Rencontre avec Kenia Almaraz Murillo et Elliott Causse

Kenia Almaraz Murillo et Eliott Causse, pour Maison Gutenberg
Kenia Almaraz Murillo et Eliott Causse, pour Maison Gutenberg et SYTRAL Mobilités
Kenia Almaraz Murillo et Eliott Causse, pour Maison Gutenberg et SYTRAL Mobilités

Kenia Almaraz Murillo et Elliott Causse © Nano Ville

 

Quand l’art contemporain dialogue avec l’urbanité et la tradition


En ce mois de décembre 2024, le métro lyonnais célèbre les 50 ans de mise en service du premier tronçon de la ligne C. SYTRAL Mobilités, en partenariat avec Maison Gutenberg, déploie plusieurs propositions culturelles et artistiques pour fêter cet anniversaire. Parmi celles-ci, les artistes Kenia Almaraz Murillo et Elliott Causse ont été invités à réaliser une œuvre d’art murale à la station Hôtel-de-Ville et un habillage artistique d’une rame de métro.


Kenia Almaraz Murillo et Elliott Causse, deux artistes diplômés des Beaux-Arts de Paris, fusionnent depuis 10 ans leurs univers dans des créations In situ mêlant géométrie, couleurs andines et dynamisme urbain. Dans des fresques murales pétries de symboles et de réflexions sur les flux humains et énergétiques, leur collaboration explore les frontières entre tradition textile et modernité architecturale. Cette année dans le cadre des 50 ans de la ligne C, le binôme intervient à Lyon avec un projet qui tisse des liens uniques entre l’histoire, le mouvement, et l’urbanisme. Rencontre croisée avec les artistes.


Louise GrossenVos univers artistiques dialoguent ponctuellement depuis dix ans. Que représente ce projet de fresque dans le métro lyonnais pour vous ?

 

Kenia Almaraz Murillo — Ce projet est un aboutissement. On s’est toujours dit qu’il serait incroyable d’intervenir dans un métro à deux, c’est une réflexion que l’on mène depuis longtemps. En discutant du projet avec les équipes, on s’est rendu compte de l’évidence et de la symbolique. Évidemment, le rapport au patrimoine des tisserands, au fil, qui est central à mon travail, mêlé à l’idée des flux, des réseaux, des cartographies, et à l’univers du transport qui entourent le travail d’Elliott.


Elliott Causse — On a fait beaucoup de fresques entre la Bolivie, où est née Kenia, et la France. J’avais aussi créé dans un métro en 2015 à Kyoto. J’étais invité par Tadashi Kawamata, qui m’a beaucoup apporté et qui a accompagné un virage décisif dans mon travail lié aux flux. Dix ans plus tard, on se retrouve à créer dans un métro français !


Elliott, le monde du graffiti duquel vous venez, a glissé naturellement vers celui de l’urbanisme, pourquoi ?

 

Elliott : Le livre City of Quartz de Mike Davis sur l’urbanisme à Los Angeles a été crucial. Comment l’urbanisme a été pensé pour gérer la gestion des foules, les déplacements urbains… Il y a des choses qui font échos au graffiti : la notion du déplacement dans la ville quand tu graffes, la cartographie, un geste d’écriture aussi. J’aime documenter les déplacements d’énergie, d’électricité, la plomberie m’influence aussi.


Le travail du tissage de Kenia et les créations murales d’Elliott semblent fusionner naturellement alors même que ces deux disciplines semblent plutôt éloignées…


Kenia : Elliott m’invite dans son univers de l’immersion in situ, de la peinture murale, de l’espace au niveau architectural, mental. Je sors un peu de ce rapport au métier à tisser plus contemplatif. Il y a un travail assez logistique de géométrie, de symétrie, et en même temps, un côté organique et coloré. Les couleurs vives viennent de mon univers du textile andin, des communautés boliviennes.


La technique du tissage vous a été transmise en France.

 

Kenia — J’ai été formée par l’artiste contemporaine Simone Prouvé. C’était fort comme rencontre parce que outre l’apprentissage, la transmission, elle a permis aussi de réactiver, de l’autre bout du monde, mes racines traditionnelles et familiales du tissage. Face au fil, tu as besoin de mettre de l’ordre. Il faut faire une balance entre lignes verticales et horizontales, il y a une sorte de concentration constante qui fait que tu oublies l’espace-temps. Puis je me suis prise d’obsession pour les couleurs et la géométrie du textile andin. Il y a toujours un horizon coloré avec une trame. Ici, je viens travailler à la brosse pour créer des sortes de vibrations, des fréquences. J’ai accentué un motif qui fait écho à la crémaillère particulière de la ligne C. Pour les couleurs, on retrouve le rouge de manière assez évidente sur mon travail, puis le bleu, et là, on travaille sur l’orange un peu électrique en écho aux anciennes couleurs du métro.


Le processus créatif de cette fresque rappelle la structure du palimpseste avec son empilement de lignes et de significations…

 

Elliott — On a posé la ligne horizontale avant l’arrivée de l’orange. Les deux lignes rouges renvoient aux rails. Kenia apporte une sorte de rythme cinétique par son geste, un peu comme s’il y avait des fils.

 

Kenia — Oui, une écriture. J’ai un rapport aux lignes horizontales. Je pose cette ligne comme une sorte de colonne vertébrale. Ensuite, Eliott apporte l’énergie verticale et des flux, on tisse la ligne pour écrire une sorte de langage abstrait, à la fois géométrique, contrôlé, mais en même temps futuriste et en écho aux fréquences de la lumière… On a une philosophie de création In situ qui s’adapte énormément au lieu qui est donné, à l’énergie qui se dégage des espaces.

Vous travaillez les lignes à main levée, ce qui nécessite un contrôle de la respiration, du corps. Et puis, il faut faire vite : pour cette fresque, vous devez travailler de nuit, sur les quelques heures où le métro ne circule pas.

 

Elliott — C’est une chose qui me restait du graffiti, le hand style, sorte de calligraphie aussi. Tu libères une énergie comme dans le sport. Tu te mets en condition où tu vas donner le meilleur de toi-même pendant 10 secondes. En termes de gainage physique, quand tu es sur un escabeau, il faut être en contrôle total. Mais avant d’arriver à ce geste-là, il y a tout un processus d’installation à mettre en place, puis le geste doit être précis, efficace, avant que le métro redémarre.

 

C’est aussi une façon de remettre le geste humain au centre, à l’heure où la technologie seconde de plus en plus le geste artistique ?

 

Elliott — J’ai l’impression que les gens sont parfois lassés du côté IA, robotique de l’art… Il y aurait sûrement une manière plus précise de tracer ma ligne, mais j’aime qu’il reste le geste et la vibration imprévisible de la main pour ce que l’on veut raconter.

 

Kenia — C’est une histoire de dosage. C’est l’excès qui peut faire peur. Il ne faut pas oublier la notion principale qui est de juste exister en harmonie avec ce que l’on trouve autour. Dans le tissage, il y deux énergies contradictoires entre ce que la terre donne, et ce que l’homme crée.


Vous adaptez le geste à l’histoire du lieu qui accueille votre travail.

 

Kenia — Chaque geste, même s’il est répétitif, a son propre ADN. Ça crée une sorte d’alchimie sur place. C’est fascinant comme Elliott n’a pas peur de l’espace, au contraire, il l’embrasse. Moi, dans un espace, je vais m’attacher au rapport énergétique. Quelle est l’histoire du lieu ? De quoi l’endroit est-il imprégné ?

 

Vous évoquiez le rapport cinétique. Comment intervient-il dans cette proposition artistique ? Qu’attendez-vous des passants dans leur interprétation ?

 

Kenia — Ce qu’on souhaite avant tout, c’est que les personnes se sentent bien accompagnées. C’est un espace public, on offre une petite pause ludique dans le déplacement, sans prise de tête. Il y a toujours un rapport cinétique : quand on se déplace, les lignes bougent forcément par le changement de perspective. Dans le métro, il y a un lien direct avec le flux, ça nous suffit d’être dans ce rapport-là assez simple avec les gens. Si l’envie leur prend ensuite de creuser notre travail et d’ouvrir les pistes de lecture, libre à eux.


Elliott — On a vocation à décloisonner les pratiques, à se rapprocher de l’urbanisme et de l’architecture qui inversement peuvent avoir des aspects artistiques. Dire qu’il y a les artistes qui font les tableaux dans les ateliers et qu’il y a les architectes qui font les bâtiments, c’est une réflexion peu porteuse de positivité. Il y a plein d’artistes qui  s’épanouissent dans des espaces publics. La société a énormément d’entrées pour faire de l’art.

 

Vous semblez très sensibles à la responsabilité qu’implique la création dans l’espace public. 

 

Kenia — Oui, il y a une responsabilité de ne pas laisser sa psyché d’artiste… torturée ! Créer un objet qui soit porteur de bonnes énergies pour le grand public. Il peut exister une forme de chaos dans la construction, la destruction constante. Mais notre propos personnel, c’est avant tout de partager une bienveillance à travers les lignes pour tranquillement se laisser embrasser.

 

— Interview réalisée par Louise Grossen pour Maison Gutenberg



L’art, un jeu d’enfant ?

Atelier d'argile de Alexia B. pour Maison Gutenberg

© Atelier « Toucher et sculpter l’argile » de Alexia B.

 

Depuis 2023, Maison Gutenberg se met au service des tout-petits en crèche afin d’accompagner l’éveil à l’art, par l’art. À Lyon et Marseille, les artistes Alexia B, Stéphanie Buiguez, Charlotte Develter et Henri Lamy ont imaginé, chacun et chacune à leur manière, un dispositif immersif adapté aux bébés pour nourrir les sens et accompagner cette première plongée dans le monde artistique, favorable à la construction cérébrale et à l’équilibre émotionnel.

N’est-il pas captivant de regarder un bébé regarder ? Ou bien d’observer un bébé en train d’écouter ? C’est le postulat de la psychologue clinicienne spécialisée dans la petite enfance Sophie Marinopoulos — qui s’intéresse à l’art et la culture chez les tout-petits. Les bébés sont des êtres de culture qui doivent être nourris de ce monde du sensible qui les alimente et qui les aide à grandir. Bien avant le langage, c’est par la sensorialité que les petits prennent lien avec l’extérieur. Loin de l’idée d’en faire un bébé compétent — mais bien un enfant curieux et heureux, l’éveil artistique en crèche se place là. C’est au travers de résidences d’artistes dans neuf crèches différentes, réparties entre Lyon et Marseille, que Maison Gutenberg poursuit le projet de décloisonner les frontières entre l’art et les publics, en proposant aux enfants en bas âge une rencontre privilégiée entre artistes, enfants et personnels. Le personnel se voit endosser un nouveau rôle auprès de l’enfant, faisant alors équipe avec lui pour créer un type d’interaction par l’art qui favorise une relation basée sur l’échange, l’écoute, et la co-création. L’accompagnant devient un guide bienveillant qui soutient l’expression individuelle des tout petits.


Admirative de la capacité des bébés à se saisir des expériences qu’on leur présente, à reconnaître la beauté d’un geste, le rythme d’un morceau de musique, la douceur d’un matériau, Maison Gutenberg s’est alliée d’artistes concernés par le domaine de l’enfance et de la médiation culturelle pour développer un programme d’ateliers artistiques protéiformes et inspiré de l’art contemporain. Pas à pas, au travers des thèmes de la lumière (celle qui éclaire, par définition celle qui rend visible le monde) et de la trace (qui s’inscrit dans une sphère plastique en sollicitant la matière à travers plusieurs formes et techniques), les enfants guidés par l’artiste plongent dans une découverte poétique du monde qui les entoure…


Images, son, matières et textures — Alexia B, Stéphanie Buiguez, Charlotte Develter et Henri Lamy usent de tous les médiums comme points de départ à la création, au jeu et à l’expérience des émotions. Convaincus que ces petits humains qui ont besoin de narratif n’en sont pas moins exigeants, un point d’honneur est mis à la qualité du matériel proposé. Alexia explique d’ailleurs : “L’idée est de les encourager à avoir leur propre créativité en leur donnant les moyens d’explorer — avec quelques éléments, souvent issus du recyclage, sans trop en mettre car l’enfant ne saurait pas où donner de la tête. L’enjeu est aussi de le surprendre avec du matériel qu’il n’a pas l’habitude de voir, en détournant l’objet de son utilisation initiale. On ne travaille pas sur tables et chaises, mais au sol, sur de grands formats, pour respecter le développement de l’enfant qui à ce stade se joue dans la motricité. C’est un espace qui leur appartient.”


C’est une pédagogie bien particulière que l’artiste privilégie. Ici, l’adulte n’est là que pour accompagner. Il devient observateur de la scène : “on n’intervient que s’il y a danger, ou pour encourager l’enfant dans son exploration. Il peut d’ailleurs y avoir des moments de flottement au début d’un atelier, c’est normal, le temps que le groupe se saisisse des médiums proposés. L’enfant est un chercheur, et c’est en cela que le fonctionnement de l’artiste est similaire — dans l’utilisation détournée de l’objet, dans le test, dans la recherche… le rendu ne m’intéresse pas.”  Dans cette dynamique inspirée de l’art contemporain : aucun enjeu de résultat. Mais une attention est portée à la mise en scène, à l’esthétique graphique des activités, et aux thématiques proposées — souvent en lien avec un matériau à ausculter. Et comme la création finale importe peu, l’artiste s’attache au travail de documentation et d’archivage photographique comme excellente manière de retranscrire aux familles le contenu des ateliers, et d’en garder une trace poétique : “c’est vraiment beau de voir l’enfant se saisir de l’art, et très émouvant par moment. On observe aussi à quel point, même des publics a priori turbulents, arrivent à se concentrer parfois une heure sur un atelier, alors qu’ils sont tout petits.”


Il est étonnant d’observer ce qu’un objet d’art peut dire aux enfants. Dépourvu de toute raison, affranchi du beau, il exprime autre chose du monde, auquel les tout-petits sont parfaitement sensibles. Et comme le prosifie joliment Sarah Mattera (directrice artistique du centre d’initiation à l’art Mille Formes à Clermont-Ferrand) : « l’éveil artistique nourrit la capacité à échanger les sens : à voir avec la peau, à écouter avec les yeux ».


— Article écrit par Louise Grossen pour Maison Gutenberg

 

 Pour aller plus loin

 

Émission la culture au berceau sur radio france 
– Rapport de Sophie Marinopoulos
– L’éveil culturel, Télérama
– Les livres d’initiation à l’art de Marie Sellier

Les Murmures du Temps : quand cohabitent l’œuvre, l’artiste et le reste du monde

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© Le grand rocher de Laurent Pernot, photo de Lionel Rault

 

L’art contemporain revendique de nos jours une porosité significative face aux enjeux sociétaux et environnementaux. Il encourage la prolifération de travaux artistiques imprégnés d’une nécessité de compréhension et de réflexion sur la planète que nous habitons, et, à fortiori, que nous malmenons. Naissent alors des formes d’art sensibles aux problématiques environnementales, un art dit « écologique », un art de combat, pour prendre les termes de l’historien de l’art Paul Ardenne. Un art, pour lequel notre équipe s’engage dans les projets qu’elle mène. 

Mais alors que pourrait l’œuvre face aux ravages des dérèglements climatiques actuels ? Gaspillage des ressources, pollution des sols, activité humaine désorganisatrice de la vie de nos environnements…. Inspiré par la nature, habité par la question de la prise de conscience, préoccupé par les enjeux environnementaux, décidé à faire corps avec le dehors — un nouveau courant a éclos, désertant au passage les lieux institutionnels d’exposition pour s’immerger dans l’espace public, du dessous, ou du là-haut, pourvu que l’œuvre appelle à une mise en valeur d’une réalité brute.
 
Cette question est celle à laquelle se frottent des centaines d’artistes plasticiennes et plasticiens, désormais investis d’une mission de sensibilisation dans un monde où l’actualité nous rappelle chaque jour combien l’humain est coupable des grands désordres écologiques qui secouent notre planète.
 
Des interventions in situ
 
Ce mouvement s’inspire du courant appelé « Land Art » né à la fin des années 1960, qui sort alors l’artiste de l’atelier pour le fondre dans le paysage et l’y faire travailler in situ. Mais plutôt qu’utiliser la nature comme simple outil de travail, un glissement progressif s’opère — accéléré par la prise de conscience écologique. L’artiste concentre dès lors son attention vers des travaux visant davantage au soin d’une nature en péril…
 
Naît alors une culture de l’attention au réel. Le spectateur et l’artiste sont placés dans le paysage plutôt que devant — littéralement « entrer dans l’œuvre » comme l’illustre le travail photographique de Giovanni Anselmo. Bienvenue dans un temps où l’homme et le vivant ne sont plus opposés, mais illustrent par l’art une étroite collaboration, et rendent ensemble visibles les manifestations anthropocènes invisibles.
D’aucuns auront peut-être déjà croisé Bee’s bunker, l’œuvre fonctionnelle et poétique de Nicolas Floc’h — qui installe dans une clairière du massif de Marcaulieu huit blocs de pierre transformés en habitats-forteresse pour des colonies d’abeilles noires. Ou la série de jardins actifs de Patricia Johanson — Leonhardt Lagoon — achevée en 1985, tributaires de la situation écologique, topographique et biologique du milieu. Les installations développées à partir d’un mortier minéral de Jérémy Gobé, l’œuvre complète de l’artiste cueilleur Adrien Mesot, le sanctuaire de la nature installé par Herman de Vries, ou quand le corps nu de l’artiste devient aussi objet d’art avec Alan Sonfist, jusque dans la ferme urbaine de Saint-Denis… en sont des exemples probants de l’histoire de l’art contemporain.

 
Mais plus proche de nous, du côté du Pays de L’Arbresle, se concentre depuis l’année 2021 un vivier riche de quelques-uns de ces artistes plasticiens et plasticiennes, parfois devenus scientifiques, planteurs et planteuses, ou aménageurs d’espace en quête de relations harmonieuses avec l’environnement — qui progressent dans la bataille pour l’écologie et l’écosophie* (concept du philosophe Arne Næss). À travers le projet des Murmures du Temps sous la direction artistique de Maison Gutenberg, il et elles sont onze à créer in situ dans une perspective de réparation et de redéfinition de nos rapports entre humanité et écosystèmes.
 
* Arne Naess est à l’origine du concept d’écosophie ou d’écologie profonde. Selon lui, l’Homme et la Nature sont indissociables. « L’homme ne se situe pas au sommet de la hiérarchie du vivant, mais s’inscrit au contraire dans l’écosphère comme une partie qui s’insère dans le tout ».
 
 
Tout le monde dehors
 
Le parcours pédestre des Murmures du Temps inauguré les 6 et 7 juillet 2024, invite les promeneurs et promeneuses à comprendre comment ces espaces, modifiés, domestiqués, peuvent aussi recevoir soin et attention. On découvrira par exemple l’œuvre tressée d’Amandine Guruceaga — artiste plurielle qui se joue des frontières entre l’art et l’artisanat, l’organique et la technique. Ses œuvres questionnent l’histoire socio-économique des matériaux et révèlent la fascination de l’artiste pour la migration des formes et des motifs et de la frontière entre peinture et sculpture. Son travail sur le parcours questionne alors les premières interventions de l’homme sur la nature, notamment par l’action même de segmenter les espaces naturels…
 
Parfois, le travail artistique est fruit d’un processus dont le spectateur devient partie prenante. C’est le cas de l’œuvre de Caroline le Méhauté, qui s’intéresse à l’extraction minière sur le territoire, développée sur plusieurs siècles, entraînant une pollution des sols par ruissellement des eaux chargées en acide et en métaux lourds. Elle explore le dessous, et part récolter, avec les habitants, cinq roches qui seront analysées, disséquées, agrandies, et exposées sous de grands verres dans une démarche de mémoire de l’invisible.
 
Plus loin, au Val des Chenevières à L’Arbresle, Laurent Pernot met en garde l’humain face au risque accru d’aléas climatiques. Façonnée par des conditions météorologiques depuis plusieurs siècles, la nature a ici éprouvé des événements qui ont marqué la mémoire des habitants ; les rivières de la Brévenne et de la Turdine ont débordé à plusieurs reprises, provoquant de terribles ravages sur les communes. Laurent Pernot propose une sculpture dont la silhouette, suggérant une érosion par les eaux, manifeste cette fragilité indéniable.
 
Sur la place Sapéon, toujours à L’Arbresle, les réflecteurs du designer Nathanaël Abeille installés sur une colline au nord, ont pour mission de renvoyer des rayons du soleil qui colorent et éclairent les façades du quai des Frênes d’ordinaire privées de lumière naturelle à cause de l’urbanisation.
 
Il arrive que le geste artistique se décale en geste scientifique. La sculpture, portée par le Duo Evernia — composé de Julie Escoffier, artiste plasticienne, et d’Héloïse Thouément, ingénieure chercheuse en chimie — articule art et science sur le parcours. Cette dernière, pensée comme une ode au travail de la vigne, propose de porter attention à la préservation des sols. Elle souligne l’acidité des eaux de pluie lyonnaises, questionne les différentes pratiques de traitement de la vigne à travers des transformations d’ordre chimiques, physiques et biologiques dans une sculpture évolutive, qui fait plus largement écho au territoire naturel, culturel et industriel local.
 
L’actuel marasme écologique motive la sphère culturelle à s’engager, à réagir, à se faire l’écho d’un désordre global. Car qui, sinon les artistes, experts en sensibilités, pour développer d’autres rapports au monde ? Ce lien entre esthétisme et fonction — qui forme parfois la base de la création plastique — créé avec ce que la nature offre, tout en engageant avec elle un dialogue. Ces œuvres de l’art contemporain qui pensent les évolutions du monde motivent alors l’usage du terme « anthropocène », et nous motive, nous, public, à nous engager aux côtés de celles et ceux qui les conçoivent.

— Article écrit par Louise Grossen pour Maison Gutenberg

 
 

 Pour aller plus loin

– Le site projetcoal.org (accompagne l’émergence d’une nouvelle culture de l’écologie et du vivant à travers des actions emblématiques tel que le Prix COAL)
– Philippe Descola, « Par-delà nature et culture »
– Podcast Radio France dirigé par Paul Ardenne, « L’Art est l’environnement »
– Timothy Morton « Hyperobjets: philosophie et écologie après la fin du monde »
– Nathalie Blanc, Ecoplasties, Art et Environnement

Cycles 2022-2023 : Restitution d’un projet haut en couleurs

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Le 8 avril marque la fin de Cycles, projet tenu sur le territoire bressan pour la deuxième année consécutive.  

Tout au long de l’année, cette résidence artistique menée main dans la main avec Grand Bourg Agglomération a donné lieu à des ateliers de pratiques artistiques dans diverses structures (Institut médico-éducatif, EHPAD, collèges…)  avec les artistes Victor Boucon, Dounia Jauneaud, La compagnie Ö les Mains ! et la compagnie Volcà. 

En s’appuyant sur les trois piliers de l’Éducation Artistique et Culturelle (la rencontre avec les œuvres et les artistes, la découverte de nouvelles pratiques artistiques et l’acquisition de connaissance) chaque artiste a proposé des ateliers mêlant différentes formes d’art. Du théâtre en Langue des Signes Française, de la danse contemporaine, du détournement d’objets en passant par de la création vidéo,  les productions de ces ateliers furent valorisées  durant  quatre jours de restitution. Suivant le fil rouge écrit par Malvina Migné, artistes et participants ont imaginé ensemble le spectacle Lisières, dont les représentations furent un succès !

Compagnie Ö les Mains !  

Histoire contée par Malvina Migné, signée et interprétée par Clémence Zakiri, ce fil rouge retrace l’histoire de la Passagère et d’un oiseau voulant trouver son nid. Une invitation au voyage pour les petits comme pour les grands.

Compagnie Volcà

Les danseuses et chorégraphes Lydie Boiston et Malou Rédarès ont donné des ateliers de danse contemporaine aux élèves pour leur permettre de se connecter à leur corps et aux autres. Elles ont illustré le récit du spectacle par des moments de danses envoûtantes et poétiques.

Dounia Jeaunaud 

Ces ateliers mêlant art de la performance, théâtre et stop motion sur le thème des oiseaux ont fait l’objet de plusieurs créations vidéo afin d’habiller la scénographie du spectacle.   

Victor Boucon

Scénographe du spectacle, Victor a mis à contribution toutes les constructions faites en ateliers avec les participants en respectant la technique du low-tech et du détournement d’objets, en recyclant toutes sortes de matériaux afin de leur donner une seconde vie.

C’est avec des souvenirs plein la tête que nous clôturons nos interventions sur le territoire bressan. 

De nouveaux et beaux projets nous attendent prochainement…

Cycles : Atelier de danse à l’Ehpad de Saint-Trivier-de-Courtes avec Dounia Jauneaud et la Cie Volcà 

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C’est sur une note nostalgique que l’artiste Dounia Jauneaud et les danseuses de la compagnie Volcà,  Lydie Boiston et Malou Redares, ont dit au revoir aux résident.e.s. 

Pendant leurs interventions, elles ont proposé aux participant.e.s d’explorer la thématique des mains, leurs utilités et les relations que nous entretenons avec ces dernières tout au long d’une vie. Introduite par un temps de parole pour faire connaissance et comprendre leur approche sur le sujet, une chorégraphie manuelle participative leur fut proposée afin de travailler la mémoire corporelle, de prendre conscience de l’importance et de la délicatesse de cette partie du corps.

Ces moments forts en émotion ont été capturés par l’artiste Dounia Jauneaud qui intégrera ces images dans la vidéo du spectacle “Lisières”, lors de la restitution du projet qui se déroulera du jeudi 6 au 8 avril 2023 à la salle multimédia de Foissiat. 

Crédit photos : Ema Gauthier

Cycles : Atelier de danse avec la Cie Volcà à Saint-Trivier-de-Courtes

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Ce vendredi 27 janvier, la Bresse a accueilli les artistes Malou Rédarès et Lydie Boiston dans le cadre du projet de résidence artistique CYCLES que nous menons actuellement sur le territoire depuis plus d’un an.

C’est dans la classe de CM2 de l’école primaire
de Saint-Trivier-de-Courtes que les deux chorégraphes ont donné l’opportunité aux enfants de s’exprimer
à travers des ateliers de danse. Inspiré de la création d’un spectacle qui sera présenté en avril 2023 sur le territoire,
l’atelier s’est ouvert avec des échauffements articulaires. Découpés en plusieurs exercices sur la prise de conscience du corps et de l’esprit dans l’espace, les élèves ont pu s’initier aux pratiques de la danse contemporaine. Être capable de transcrire dans son corps une émotion, une sensation, savoir observer et lire les corps dansants. Comme à la fin de chaque séance, un tour de parole est proposé afin de verbaliser leurs sensations, positives comme négatives, et leurs causes. 

En se connectant à leurs émotions corporelles ainsi qu’aux autres, les élèves ont expérimenté le lâcher prise dans une ambiance bienveillante et d’apprentissage de soi. 

Crédit photos : Ema Gauthier 

Paysages Pluriels : Exposition de Nicolas Coutable

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Nous marquons notre planète d’empreintes visibles et invisibles, parfois irréversibles. Les photographies de Nicolas Coutable rendent compte de ces transformations entreprises par l’Homme sur les territoires qu’il occupe.

À travers cette exposition, l’artiste interroge nos pratiques et participe à une prise de conscience collective de notre pouvoir d’agir.

À propos de Nicolas Coutable…

Le photographe a débuté sa carrière artistique en 2010 lorsqu’il s’est familiarisé à l’exploration des friches industrielles, voyant en ces déchets des « traces », de véritables stigmates laissés dans nos paysages. En 2015 il entreprend une série de résidences mobiles en Amérique du Sud, au côté de l’artiste plasticien Laurent Chiffoleau. Après des expositions à Dunkerque, Paris, Budapest et Bordeaux, Nicolas Coutable réside aux anciennes Usines Fagor de Lyon où il porte un nouveau volet de son travail consacré aux friches. Après une participation remarquée à l’exposition collective Regards sur nos Restes aux Halles du Faubourg (Lyon, janvier et février 2020), le photographe collabore avec la ville de Grenoble pour la programmation de son exposition personnelle Paysages pluriels, dans le cadre de Grenoble Capitale Verte Européenne.


Infos pratiques

– Vernissage de l’exposition le 14 décembre de 18h à 23h

– Lieu : La Plateforme , Ancien Musée de peinture, 9 place de Verdun, Grenoble.

– Gratuit

– Exposition visible à partir du 14 décembre jusqu’au 25 février, du mercredi au samedi de 13h à 19h

– Commissariat, par Romain Weber de Maison Gutenberg.

Visuel par Nicolas Coutable & Maïa d’Aboville 

Une journée festive à la Maison Saint Joseph !

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Le Bal des Immobiles s’est tenu le 24 juin à la Maison Saint Joseph ! 

 

Une journée de restitution festive qui vient clôturer une année d’ateliers pluridisciplinaires mêlant art du cirque et arts plastiques avec 3 EHPAD (Saint Joseph, Ma Demeure & Saint Joseph).


C’est à travers la pratique de la danse, des arts du cirque mais aussi de la peinture, et du collage que les résidents ont avancé collectivement dans la création d’un ensemble poétique et vivant. 


Cette représentation finale a pris la forme d’un spectacle déambulatoire chorégraphié, faisant intervenir autant les artistes de la compagnie Verbecelte que les résidents des 3 EHPAD.


Cette journée fut aussi l’occasion d’exposer les créations réalisées par les résidents au cours des ateliers.


Un moment précieux et poétique qui a permis aux résidents, aux artistes, aux animatrices et aux jeunes apprentis de se retrouver pour interpréter ensemble le Bal des Immobiles.


Pour l’occasion une micro-édition retraçant l’ensemble du projet a été présentée aux participants. 


Nous tenons à remercier les résidents qui se sont investis dans ce projet, les animatrices des différentes EHPAD, les jeunes apprentis,les artistes, ainsi que toutes les structures partenaires du projet. 


Avec le soutien de l’Agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes, du ministère de la Culture – DRAC Auvergne-Rhône-Alpes et de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, dans le cadre du programme régional Culture et Santé, animé par interSTICES. Ainsi que la Métropole de Lyon dans le cadre de l’appel à projets Culture(s) et Solidarités.


Crédit photos : Adrien Patacq-Croutzet

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À la découverte de l’aquaponie : Inauguration de la fresque d’Henri Lamy

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Dans le cadre du programme de médiation culturelle que nous avons mené dans le quartier de Mermoz, l’artiste Henri Lamy a réalisé une fresque sur les conteneurs de la micro-ferme urbaine d’EcosiAg.


L’inauguration de cette fresque fut l’occasion de réunir acteurs et bénéficiaires du projet, pour un moment d’échange et de partage. 


Des ateliers mêlants arts et sciences ont été animés par Dounia Jauneaud et l’association EbulliScience


Les œuvres réalisées par les enfants et adolescents du quartier tout au long du projet ont également été exposées.


Cette inauguration marque la fin du programme de médiation autour de l’aquaponie à Mermoz.

Nous tenons à remercier les artistes, les partenaires ainsi que les habitants du quartier qui ont participé à ce beau projet !


Crédit photos : Adrien Patacq-Croutzet

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Cycles : Quatre journées de célébrations artistiques

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Ça y est ! La résidence artistique Cycles s’est achevée fin mai par quatre journées de célébrations artistiques autour des arbres et du vélo. 

Les rencontres scolaires du 19 & 20 mai qui se sont déroulées dans les communes de Curciat-Dongalon, Saint-Trivier-de-Courtes ainsi qu’à la ferme du Sougey. Elles ont permis aux élèves des différents établissements de se rencontrer et de découvrir leurs expositions respectives.

À la suite de ces rencontres scolaires a eu lieu une journée festive à la ferme du Sougey, le samedi 21 mai ! 

Au programme :

 

– Exposition des créations réalisées par les habitants, les élèves et les adolescents

– Déambulation d’échassiers avec la Cie des Quidams, crieurs publics de la Cie M le Mot Dit

– Animations autours des marionnettes avec la Cie Arnica, jeux en bois de la Ferme-Musée de la Forêt et enregistrement radio de la Grange aux parapluies

– Ateliers artistiques et éducatifs avec le Rep’R et la Médiathèque de Montrevel

– Conte de la Cie Ö les Mains !, concert des artistes Chamel n°5 et Joube 

Une parade à vélo a clôturé ces festivités le dimanche 22 mai, sur la voie verte la Traverse, en présence des artistes et de la célèbre Arpenteuse réalisée spécialement pour le projet.

Un grand merci à tous les artistes présents ainsi

qu’aux habitants pour avoir enchanté cette restitution ! 

Rendez-vous l’année prochaine…  

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